[…] et tu t’exerces maintenant à penser non pour rapiécer ton cœur, tu penses non, tu cries non.
(Louise Dupré)
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Rapiécer mon cœur. Il s’agit là de l’histoire d’une vie : recoudre les petits bouts quand les fils s’effilochent à force de trop le porter, de la même façon que je me refais des réserves de fer après que mon corps a laissé aller les fibres dont il ne voulait pas.
Quand je ne sais pas à quoi dire non, je m’arrête quelques instants pour sentir les mouvements de l’eau. Je sais alors : dire oui à la main à côté de moi, dire oui au soleil; dire non à ce qui veut me faire croire que le temps presse. Dire oui aux vertiges qui bercent; dire non à ceux qui font tomber. Et le rapiéçage se fait, une syllabe à la fois, une goutte de Bosphore à la fois, mais aussi un bleu à la fois, parfois.