et je m’y suis assoupie
nombreuse comme la braise
(Émilie Turmel, Casse-gueules)
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J’ai cette envie de m’assoupir parmi le monde en mouvement, de m’allonger sur le pont plein des ronrons des goélands, d’attraper des bouts de conversations comme eux attrapent des sésames lorsque, le bec au vent, ils captent une seconde de la réalité.
Nous sommes nombreuses dans mes sommeils. Je rêve que les autres femmes puissent se reposer dans le ventre des bateaux elles aussi, qu’elles aient le temps de lever le menton pour voir les rues éclairées pour elles, qu’elles se dédoublent et se prennent elles-mêmes dans leurs bras de terre. À vol d’oiseau je vois la carte des liens qu’ont tracés jusqu’à aujourd’hui les navires, entre nous toutes iles ou péninsules.