27 janvier 2018

Elle attendait et se demanda cette nuit-là, avant de s’enfoncer dans le sommeil, si l’attente faisait partie du voyage. Attendre, n’est-ce pas déjà partir ?

(Madeleine Gagnon, Je m’appelle Bosnia)

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Attendre le sommeil est devenu un des moments de la journée que je préfère depuis que ma bonne amie m’a appris que même si on ne dort pas, être en position couchée repose le corps. Ne pas dormir encore fait donc partie de la nuit – je m’y fais et déjà mes paupières s’enfoncent, mes muscles deviennent souples comme ceux des goélands pêcheurs de simit en plein vol…

Je suis moi-même en plein vol; voler, c’est aussi attendre. C’est maitriser la suspension, savoir que l’immobilité fait autant partie de la course que les battements effrénés, ces tachycardies qui relient les ailes au coeur. Que quand on est lancé.e dans l’air marin, il n’y a pas d’équilibre sans les deux extrêmes.

5 janvier 2018

Elle attendait et se demanda cette nuit-là, avant de s’enfoncer dans le sommeil, si l’attente faisait partie du voyage. Attendre, n’est-ce pas déjà partir ?

(Madeleine Gagnon, Je m’appelle Bosnia)

 

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La neige a choisi que je devais attendre, la tempête a joué dans mes plans et les a étalés autrement, puis ensevelis. Pourtant je me lève en paix avec un sourire ouaté, en guirlande de Noël, toute-puissante face à mon jouet du jour : ces couleurs à déterrer, à réorganiser dans ce cahier blanc qu’est mon salon enfoui.

Aujourd’hui, en pyjama, les cheveux et le cœur en chamade, je pars. Je m’enfonce dans l’attente comme je le fais dans un sommeil productif. Je construis mon rêve, pelotonnée dans mon corps, brillant.

22 novembre 2017

Elle attendait et se demanda cette nuit-là, avant de s’enfoncer dans le sommeil, si l’attente faisait partie du voyage. Attendre, n’est-ce pas déjà partir ?

(Madeleine Gagnon, Je m’appelle Bosnia)

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J’attends que mon vernis vieux rose sèche, suspendue au dixième étage entre l’Asie et l’Europe, mon verre à thé en forme de bulbe de tulipe posé sur un tapis de prière à paillettes. Je ne me sens pas en voyage : je suis seulement enfoncée dans un ciel que j’ai déjà connu, me demandant si attendre suppose forcément un partir.

Ne pas dormir, compter les battements de mon cœur : un-bir, deux-iki, üç-trois véhicules en file qui ne prennent pas le temps de sauter par-dessus la clôture, foncent dedans et arrachent des pans de sommeil au passage. J’attends de dormir, et c’est là la plus belle partie. Tout court.

18 aout 2017

Elle attendait et se demanda cette nuit-là, avant de s’enfoncer dans le sommeil, si l’attente faisait partie du voyage. Attendre, n’est-ce pas déjà partir ?

(Madeleine Gagnon, Je m’appelle Bosnia)

 

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Les attentes. On m’a souvent répété de ne pas en avoir, mais c’est comme si on me disait ne rêve pas : impossible. Puis, quand les rêves se réalisent, pas exactement de la façon dont ils ont été imaginés, bien sûr, mais en mieux – toujours -, je me demande si ce n’est pas le fait d’avoir eu ces attentes qui les a matérialisées.

Ou – et c’est plus plausible – je me demande si ces attentes n’étaient pas des manifestations de la clairvoyance du monde, celle qui éclaire le fond de la tasse vide et qui y montre les profondeurs de la boisson, les sédiments de la conversation.

Et je dors, je pars en voyage, poisson du rêve qui se mange la queue.