15 mars 2018

l’endroit qu’on cherche
n’est-il jamais fixe ?

(Rachel McCrum, « Enterrez-moi dans la mer », Exit no 83, trad. Jonathan Lamy)

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Je cherche à revoir ces endroits avec les yeux des premières fois, mais je n’y arrive que pendant quelques secondes – on dirait alors que quelqu’un.e tire un rideau de soleil sur ma vue, et en un claquement de voile je me retrouve à marcher dans l’interstice entre deux visions, comme sur une carte postale ancienne envoyée par clin d’oeil ou dérision.

C’est la même chose avec la photographie : un moment qui n’a même jamais existé pour moi (parce que j’étais en dehors, en train de l’immortaliser) devient désormais la seule chose qui existe. Ce verre de thé est la preuve que j’ai fait autre chose que le boire.

26 novembre 2017

l’endroit qu’on cherche
n’est-il jamais fixe ?

(Rachel McCrum, « Enterrez-moi dans la mer », Exit no 83, trad. Jonathan Lamy)

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J’ai l’impression de ne jamais pouvoir me poser. Que si ce ne sont pas mes jambes qui m’entraînent de Bağcılar à Taksim, c’est mon cœur qui m’emmène au bord du Bosphore, là où un tout autre travail que celui des mots m’attend – travail qui file entre mes doigts vernis, ceux qui tremblent en tenant l’allume-feu devant le rond au gaz et qui ne savent pas recoudre l’effiloché du tapis de prière.

Ne te rends-tu pas compte que c’est compliqué? De trouver l’endroit pas avec sa tête, mais avec son cœur chercheur? Ça devrait pourtant être si simple… sauf que le lieu est fuyant, et mes pieds, en suspens.

9 octobre 2017

l’endroit qu’on cherche
n’est-il jamais fixe ?

(Rachel McCrum, « Enterrez-moi dans la mer », Exit no 83, trad. Jonathan Lamy)

 

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C’est parce qu’ils ne sont encore que des rêves que les rêves ont l’onctuosité du kukicha, la mélodie entrainante de la zurna et de la trompette; lorsqu’ils se matérialisent devant moi, les rêves – qui n’en sont alors plus – se doublent d’une couche de thé coincée entre les deux parois du verre, les rêves se doublent de l’écho qui réveille les vieux acouphènes de salle de classe.

C’est exact, l’endroit que je cherche / n’est jamais fixe : il avance au fil de mes errances presque militaires, au son de la corne de brume et du kös, dans une danse-sémaphore qui épelle de quoi sera fait le prochain mois… de quel rêve réalisé.