22 septembre 2017

ma démesure ordinaire

(Roseline Lambert, Cliniques)

 

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Entre Paris et Zagreb, j’ai rencontré l’ampleur de ma démesure ordinaire : pas plus large ni plus étroite qu’un siège, elle n’en brille pas moins que la nuit d’une ville vue de haut, elle n’en clignote pas moins que les éclairs surgis des ailes d’avion. J’ai vu qu’il n’y avait rien d’ordinaire à vivre dans les airs, mais aussi ce qu’il y avait d’ordinaire, de mesuré, à suivre sa petite trajectoire aux côtés des autres.

Oui, je vais quelque part, et c’est là ma chance; mais c’est aussi là la chance de tou.te.s. Nos lignes parfaitement prolongées se brisent lorsqu’on soulève la tasse pour regarder ce qui se trouve en dessous. Alors on découvre une main ouverte, paume offerte au point d’inflexion de nos rayons.

16 juin 2017

ma démesure ordinaire

(Roseline Lambert, Cliniques)

 

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Le corps, dans toute sa banalité, est fort. Il y a huit mois, je sortais de l’hôpital le souffle écourté, les côtes saillantes et le dos courbé pour protéger mon cœur en peluche, tenu serré dans mes bras. Je rêvais de Sarajevo, mais je n’osais pas y croire. Je ne pouvais croire que ce que je voyais : la boule rouge monter dans l’inspiromètre, ma démarche languissante me mener au banc devant la pharmacie, mes trous de drain se refermer peu à peu.

C’est fou comme la vision s’élargit dès qu’on retrouve un pas assuré. En fait, chacun de ces mouvements – des yeux, des jambes – accélère l’autre, jusqu’à ce que devant nos regards tienne le monde au complet.

Aujourd’hui, huit mois plus tard, je m’inquiète d’un mal d’oreille. Et je ris de ma démesure ordinaire.